Le père Noël est-il vraiment une ordure ?

Dimanche 24 décembre 2006

Seize heures trente, boulevard Haussmann, les enfants sont collés aux vitrines de Noël des grands magasins comme des mouches sur un piège gluant. Age d’insouciance qui ne s’affecte de rien quand l’imagination s’exalte.

J’avance péniblement parmi la foule et j’en veux déjà à ce père qui n’est pas le mien de m’infliger cette obligation annuelle enrubannée de tradition.
Partout, l’excitation règne, mais dans la bonne humeur et la bravoure. Car il faut être vaillant, le temps presse; je dois agir vite et bien.

A ce moment précis, l’urgence me pousse à faire le choix de la masse; de la carte cadeaux, totalement impersonnelle et vidée de toute originalité. Ma sensibilité semble anesthésiée, je déambule comme un touriste esseulé qui traine les pieds pendant que tout l’autocar attend.
Dernier passage chez un célèbre parfumeur et partout des files d’attente qui s’allongent, aux caisses, aux paquets cadeaux .J’ai envie de tout plaquer pour retomber dans la banalité d’un jour comme les autres. Que je ne croise pas un père noël car je risque de le regarder de travers.

L’heure tourne les derniers retardataires s’engouffrent rapidement dans les bouches de métro, les bras chargés de paquets qui brillent avec des reflets changeants.
Quarante minutes plus tard, j’arrive au domicile familial. L’espace de quelques minutes, je me retrouve l’épicentre d’un moment que je déteste face à des gens que j’aime. Cruel dilemme d’une soirée qui se prolonge étonnement dans le tact et la retenue.

Je donne, je reçois, j’embrasse, je joue, je partage, je ris même. Impression agréable de me sentir protégé, aimé, délesté de toute inimitié.
Sur le trajet du retour, je découvre sur mon portable de nombreux messages de circonstance et cela me fait chaud au cœur.

Si le père Noel est vraiment une ordure il l’est sournoisement, insidieusement, car ce soir il m’a invraisemblablement gâté et apaisé comme au firmament de mes jeunes années.